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Budget participatif – Participer à une commission citoyenne

Il y a un an, le Département de la Dordogne lançait la première édition de son budget participatif. Avec 30 577 votants, cette première a été une réussite en terme de participation. Mais la méthode du budget participatif de la Dordogne s’est aussi distinguée par l’usage d’un outil qui vise à impliquer davantage les citoyens dans la démarche : la commission citoyenne. Nous avons présenté il y a quelques mois le fonctionnement de la commission citoyenne du budget participatif de la Dordogne grâce à un échange avec Jean-Christophe Labails, conseiller technique au cabinet du Président du Département, Germinal PEIRO. 

Afin de compléter cette présentation, nous avons échangé avec Nadine, Francis et Claude, tous les trois membres de cette commission citoyenne. Nous avons récolté leur ressenti sur leur rôle de membre. 

Des motivations variées

Pour encourager les inscriptions à l’expérimentation de la commission citoyenne, le Conseil départemental a utilisé plusieurs supports de communication : un appel à candidatures large par la presse, la caravane du budget participatif et un courrier aux associations. C’est par ce biais que Nadine, Francis et Claude ont découvert le lancement de la commission citoyenne. Mais qu’est-ce qui a motivé leur participation ?

Les motivations sont variées. Nadine était curieuse de voir de l’intérieur comment le Département allait mener cette expérience, “je voulais découvrir comment ça allait se passer de plus près car ce n’est pas une démarche courante”. Intéressé par les démarches citoyennes, c’est tout naturellement que Claude s’est inscrit à la commission citoyenne, “c’est le fondement de notre démocratie et on a intérêt à s’approcher quand il y a des démarches innovantes de ce type”. Francis a lui pensé que s’investir dans la commission citoyenne était une bonne occasion de mieux connaître le territoire du département. Tous ont également déclaré que c’était une manière de s’intégrer davantage en rencontrant de nouvelles personnes.

Une instruction en présentiel et en ligne 

Claude rappelle que la mission principale de la commission citoyenne est de procéder à l’étude de recevabilité de toutes les idées déposées, plus de 600 en 2019, et ainsi “retenir les projets éligibles”. En l’espace de quelques semaines, les membres se réunissent plusieurs fois à Périgueux pour accomplir leur tâche. Au cours des réunions, les membres de la commission citoyenne sont répartis en groupes de quelques personnes et accompagnés par un agent du Département. Ils disposent d’un lot de projets à étudier. Ces projets sont attribués de manières aléatoire à tel ou tel groupe. Il n’y a pas de groupes dédiés à une thématique ou un territoire en particulier. 

Francis précise que chaque groupe a pour mission “d’analyser tous les projets qui lui sont attribués et ensuite de trier et retenir ceux qui correspondent aux critères de recevabilité”. Cette analyse ne suppose pas un jugement personnel mais bien l’application stricte des critères de recevabilité des projets précisés dans le règlement du budget participatif, “il y a des projets qui sous tendent un intérêt personnel, privé et non collectif donc il fallait bien les éliminer” (Nadine). Claude affirme que chaque membre du groupe donnait son avis sur les projets, “autour d’une même table, les 7 ou 8 personnes pouvaient s’exprimer librement et on recueillait l’avis des uns et des autres”.

Photo d'une réunion de la commission citoyenne au cours de l'instruction des idées.

Rapidement après le lancement de la commission citoyenne, le Département a choisi d’ouvrir un espace d’instruction privé sur sa plateforme numérique de budget participatif. Les membres pouvaient ainsi préétablir des préconisations sur les idées à instruire. Ces préconisations étaient validées lors de la réunion suivante. Selon Nadine, “c’était bénéfique de pouvoir regarder ou donner un avis sur les projets à instruire directement sur la plateforme. Tout le monde ne pouvait pas venir à chaque réunion et comme ceci même les absents pouvaient s’exprimer”. Les membres se sont aussi bien investis en réunion que sur la plateforme numérique puisque plus de 1700 commentaires ont été déposés dans l’espace d’instruction privé. Face aux difficultés d’organisation de réunions engendrées par l’épidémie de COVID 19, le Département de la Dordogne a décidé de renforcer l’usage de cet espace d’instruction privé à destination des membres de la commission citoyenne au cours de la deuxième édition.

En complément des missions principales, quelques membres de la commission citoyenne ont participé à la commission de dépouillement à l’issue de la phase de vote, “on était 8 à superviser le dépouillement : 4 personnes du Département et 4 membres de la commission citoyenne” (Francis). Leur mission était de dépouiller les bulletins papier récoltés sur les marchés et déposés dans les mairies. Après le dépouillement, ils ont ensuite validé la liste des projets lauréats. Cette pratique s’inscrit elle aussi dans une volonté de transparence.

“On arrivait facilement à se mettre d’accord au cours de l’instruction”

L’étape d’instruction est la plupart du temps réalisée par les agents des collectivités. Les citoyens sont eux rarement associés à cette démarche. Pour autant, rencontrent-ils des difficultés particulières ? A entendre les membres interrogés, la réponse est plutôt non.

Tous sont d’accord pour dire que le travail d’instruction s’est fait assez naturellement, “on arrivait facilement à se mettre d’accord au cours de l’instruction. On connaissait les critères : l’intérêt général, la faisabilité dans l’année, les limites de budgets, etc” (Claude). L’application de critères objectifs de recevabilité laisse peu de place aux doutes, “il y avait des critères relativement stricts à respecter. Dans mon groupe, quelquefois les gens auraient bien choisi des projets par affinité ou sentimentalement. Il fallait éviter ce genre de choses. C’était la principale difficulté” (Francis). 

Photo d'une réunion de la commission citoyenne au cours de l'instruction des idées.

Si opérationnellement l’instruction par la commission citoyenne n’a pas rencontrée d’accrocs, en revanche quelques membres n’ont pas toujours trouvé aisé la communication sur leur rôle auprès de la population. Nadine a par exemple observé que certains citoyens n’ont pas bien compris quel était le rôle de la commission citoyenne, “la communication avec la population n’a pas toujours été simple. Notamment quand nous avons éliminé certains projets qui n’entraient pas dans le cadre de recevabilité. Certaines personnes disaient : vous décidez pour nous. Mais non. Certains porteurs indiquent 1€ de budget pour que le projet soit accepté mais ce n’était qu’une idée et non un projet un tant soit peu structuré” (Nadine). 

Un regard sur les améliorations à apporter

Initialement, la commission citoyenne devait se réunir pour échanger sur les améliorations à apporter au fonctionnement du budget participatif. En tant qu’organe chargé du suivi du budget participatif, il apparaissait pertinent pour le Département d’associer ses membres aux évolutions du dispositif. Malheureusement, l’épidémie de COVID 19 n’a pas permis d’organiser ce temps d’échange.

Interrogés sur les évolutions à apporter au budget participatif, les membres avec qui nous avons échangé ont eu des difficultés à exprimer des préconisations d’évolution. Selon eux, la première édition était déjà bien aboutie, “personnellement, je n’ai pas l’impression qu’on puisse faire beaucoup mieux. On peut faire différemment mais faire différemment ne veut pas dire faire mieux” (Claude).

Francis pense tout de même qu’il faut allonger la phase d’instruction, “les réunions ont été organisées vite et dans un temps relativement court. L’absence de choix dans les dates de réunion a empêché la présence de certains membres”. Conscient de cette difficulté, le Département a en effet prévu d’allonger la durée de la phase d’instruction au cours de la seconde édition du budget participatif. Il n’y a nul doute qu’une réunion d’échanges sur les améliorations à apporter aurait aboutit à des enseignements complémentaires. 

Une expérience positive renouvelée

Enfin, les membres de la commission citoyenne ressentent de la fierté d’avoir participé à ce travail collectif. Claude a particulièrement apprécié d’échanger avec des citoyens assez diversifiés, “il y avait du personnel salarié, des employés de structures sociales, des retraités, des personnes de tout âge. C’était très riche. Je crois que c’est ce qui a fait la force de notre analyse. On avait des yeux, des vues différentes sur les projets et c’est en concordance entre nous qu’on a détecté la recevabilité des projets”. De son côté, Nadine retient surtout que son implication lui a permis d’avoir une meilleure connaissance de son département, “l’observation des projets déposés donne un aperçu des aspirations de la population, même si certains projets sont irréalistes. Ca donne le pouls d’une région, de ce dont les gens ont besoin et ça donne une bonne photographie du territoire”. 

Après avoir participé à cette première commission citoyenne, les membres sont convaincus de son intérêt et de sa plus value pour une collectivité, “je ne vois pas quel intérêt on aurait à s’en passer. Au contraire, c’est un message d’ouverture de la collectivité pour impliquer le citoyen à contribuer à la démocratie de notre pays” (Claude). Ils observent plusieurs effets bénéfiques : une commission citoyenne permet aux membres “de mieux appréhender les difficultés que peuvent rencontrer les agents du conseil départemental” (Claude); elle permet aussi de diffuser plus largement l’information au sein de la population car les membres sont des ambassadeurs du dispositif. 

En bref, une commission citoyenne nécessite d’accorder des moyens supplémentaires à son budget participatif. Les bénéfices sont bien plus enrichissants, aussi bien pour les élus, les agents que pour les citoyens !

Le Département de la Dordogne est convaincu par l’expérimentation. Les inscriptions sont relancées pour la deuxième édition. Inscription sur budgetparticipatif.dordogne.fr.

Découvrez un panorama des bonnes pratiques et une méthode pour la mise en place d’un budget participatif dans Le guide pratique du budget participatif.

Budget participatif et commission citoyenne : mode d’emploi

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En juillet dernier, le Département de la Dordogne a lancé son premier budget participatif. Souhaitant permettre aux citoyens de gérer une partie du budget, le Conseil Départemental est allé au bout de la démarche en associant son budget participatif à une commission citoyenne.   Cette dernière permet d’instaurer plus de délibération au sein d’un dispositif où les projecteurs sont le plus souvent tournés vers les chiffres de participation. Jean-Christophe Labails, conseiller technique au cabinet du Président du Département, Germinal PEIRO, nous précise le fonctionnement de la commission citoyenne du budget participatif Dordogne-Périgord.

Qu’est-ce que c’est une commission citoyenne ?

En bref, une commission citoyenne est un groupe composé de citoyens et (parfois) d’élus. Garants de l’intégrité de la démarche, ils sont chargés du suivi du budget participatif et de ses évolutions. D’une collectivité à une autre, les missions et la composition des commissions citoyennes diffèrent. La commission citoyenne du Département de la Dordogne est un exemple parmi d’autres mais la méthodologie employée ici est selon nous une belle source d’inspiration !

Pour Jean-Christophe Labails, la commission citoyenne est un organe du budget participatif, “le principe est de laisser les citoyens gérer une partie du budget d’investissement du Département”. Plutôt que confier intégralement le suivi du dispositif aux agents du Département, la Dordogne a fait le choix de créer une commission citoyenne pour déléguer une partie de la gestion aux citoyens. Dans les années à venir, l’objectif est de faire en sorte que le citoyen ait encore plus d’emprise sur le dispositif, “on est sur une première édition donc les élus ont décidé d’un règlement mais l’objectif est que les citoyens puissent le faire évoluer à l’avenir”. Puisque l’enveloppe budgétaire est votée, charge aux citoyens de s’en emparer comme ils le souhaitent !

Une composition mixte

La commission citoyenne de la Dordogne est composée de citoyens et d’élus, “le nombre d’élus respecte la proportion des groupes politiques du Conseil Départemental”. Du côté des citoyens, un appel a été lancé auprès des associations connues par le Département, “le Président les a informé de la tenue du budget participatif et de la création de la commission citoyenne. Il les a invité à suivre cette dynamique”. Au mois de septembre, la caravane du budget participatif qui a sillonné les marchés du département a également encouragé les citoyens à s’inscrire à la commission citoyenne. Ce sont les membres de la commission citoyenne qui ont décidé de la date de fermeture des inscriptions. Pour cette première édition du budget participatif, 115 membres composent la commission citoyenne. 

Une méthode de travail qui alterne présentiel et numérique

Chargée du suivi du budget participatif dans son ensemble, la commission citoyenne effectue des missions qui évoluent au gré des étapes de la démarche : définition des conditions de dépôt et de vote, instruction des idées, validation des projets soumis au vote, veille au bon déroulement de la campagne, évaluation de l’édition pour faire évoluer le règlement l’année suivante… La commission citoyenne n’a pas un simple rôle consultatif mais un réel pouvoir d’arbitrage, “toutes les idées ont été lues par les membres, tous les projets soumis ont été validés en amont du vote”. Les membres tiennent à appliquer le règlement à la virgule près !

Au cours de la démarche, la méthode d’instruction des idées a évoluée,  “en amont de de la commission citoyenne, une commission administrative, composée d’agents, se réunissait pour déterminer la recevabilité des idées sous un regard technique”. Cette commission administrative avait pour but de donner des pistes de réflexion aux membres de la commission citoyenne, “on s’est rendu compte que la plupart du temps, les avis de la commission administrative étaient les mêmes que ceux de la commission citoyenne”. Selon Jean-Christophe, “il y a toujours des raisons objectives pour accepter ou refuser un projet”. L’équipe chargée du budget participatif a progressivement allégé la procédure d’étude des projets après avoir observé que les citoyens pouvaient être relativement autonomes à ce sujet.

Une méthode d’instruction en ligne

De septembre jusqu’au mois de décembre, les membres se sont réunis 5 fois pour l’instruction des idées et plus récemment pour valider les résultats définitifs du budget participatif. L’originalité de la commission citoyenne de la Dordogne, réside dans sa méthode de travail qui alterne des temps de travail en plénière et des temps de travail à distance via la plateforme numérique, “dès la première réunion, ils ont voulu être associés en amont des réunions plénières à la réflexion sur les idées. Notamment parce qu’il y avait la question de la distance”. Pour ne pas pénaliser les membres qui ne peuvent pas se rendre à une réunion, un espace d’instruction privé a été configuré sur la plateforme numérique, “on a créé sur la plateforme un espace où ils pouvaient discuter en amont et déjà pré-établir des préconisations sur les idées”. Plus de 1700 commentaires ont été déposés sur la plateforme par les membres. La preuve que la commission citoyenne a créé une belle émulation collective chez ses membres !

Plus de garanties de transparence et d’intégrité de la démarche

Rien n’oblige une collectivité à mettre en place une commission citoyenne, mais vu les bienfaits observés il serait dommage de s’en priver ! Pour Jean-Christophe, la plus-value numéro 1 d’une commission citoyenne c’est la plus forte implication des citoyens qu’elle génère, “le fait d’être acteur, que les citoyens soient en capacité d’animer et de gérer le budget participatif eux-mêmes”. La seconde plus-value, c’est le gain de confiance des citoyens envers l’intégrité de la démarche, “ils ne peuvent pas avoir de suspicions sur la sincérité de la démarche. Des membres, rencontrés sur les marchés, se sont inscrits car ils étaient sceptiques. Ils nous disaient : on n’y croit plus. Nous les avons encouragés à s’inscrire pour voir d’eux-mêmes. Et ils voient bien que la commission citoyenne fonctionne”. Enfin, ce mode de fonctionnement permet aussi aux “membres de comprendre comment fonctionne une politique publique et comment vivre la décision politique. Ils se réapproprient un espace politique”. Des bénéfices observables pour l’ensemble des budgets participatifs mais qui sont renforcés grâce à l’introduction d’une commission citoyenne.

D’autres vertus sont visibles en interne, au sein de la collectivité. Notamment le changement de posture de l’agent qui passe de technicien à facilitateur de projet. Jean-Christophe prend l’exemple de la phase d’analyse des idées pendant laquelle les agents du Département ont reçu une feuille de route par les membres de la commission citoyenne, “certaines idées impliquaient des dépenses de fonctionnement et étaient donc hors règlement. Les membres nous ont donné comme mission de recontacter les porteurs pour transformer leurs idées. L’idée c’est d’accompagner le citoyen pour que son projet se réalise”. 

L’organisation de la commission citoyenne consomme beaucoup de temps de travail et nécessite de la réactivité. Jean-Christophe considère que créer une commission citoyenne “est plus lourd mais aussi plus intéressant et stimulant”. Que retenir donc de cette expérience ? Au delà des chiffres de participation, un groupe plus restreint qui fournit un travail qualitatif aussi précieux est également le symbole d’une belle vitalité citoyenne !

Pour en savoir plus sur le budget participatif Dordogne-Périgord.

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